GAEC MALABRIT

Gaec Malabrit en Loire Atlantique : "Les systèmes herbagers pâturants attirent des profils atypiques"

Imaginez un trio qui, par ordre d'importance, dégage 10 semaines de congés et 40000€ de revenu individuel par an, dont seulement 20% dépendent des aides, qui rémunère ses 37 heures hebdomadaires à hauteur de 24€, et dont "l'entrée au capital" du Gaec ne s'élève qu'à 30000€. Oh la belle histoire songez-vous probablement. Ce sont pourtant les arguments que fait valoir le Gaec Malabrit à Vieillevigne au sud de la Loire-Atlantique.


Imaginez encore 3 associés aux expériences et aux profils différents. L'un préalablement agriculteur dans une autre structure; un second titulaire d'un doctorat en géographie et instituteur pendant 15 ans; et le troisième – diplômé d'un BTS en biochimie et passé par une expérience professionnelle dans un laboratoire spécialisé dans le dépistage du cancer – qui a grandi dans une famille ouvrière très militante. Par conséquent, ne vous étonnez pas qu'une philosophie de la simplification finement maîtrisée soit le moteur de l'organisation de leur travail et que la ferme ne soit que le support de leur revenu.

Portrait

Gildas Simonneau - GAEC MALABRIT

Gildas Simonneau, 41 ans, cumule un BTS en biochimie et un BTS en gestion et protection de la nature. Il est entré au Gaec en 2011, en remplacement d'un associé après CAP agricole en alternance. "Nous aimons notre travail, traire, vêler et même ensiler chez les voisins".


Portrait

Dominique Chailloux - GAEC MALABRIT

Préalablement installé sur la ferme familiale pendant 15 ans, Dominique Chaillou (50 ans) a ensuite été salarié à Malabrit pendant 3 ans, s'est intéressé au système pâturant puis s'est associé. "Nous comptons 800h de tracteur par an, dont une bonne partie au rabot" s'empresse t-il de préciser avec une pointe d'humour.


Portrait

Philippe Tanguy - GAEC MALABRIT

Philippe Tanguy, 49 ans a été 15 ans instituteur à Vieillevigne. Il avait consacré Doctorat en géographie à la pauvreté urbaine liée à la sédentarisation en Mauritanie. D'abord stagiaire en parrainage à la ferme pendant 8 mois tout en bûchant son bac pro simultané à distance. "Nous réalisons 80% de valeur ajoutée sur le lait produit".


Ne pas alourdir la transmission

"La ferme est un lieu de passage et de travail, pas plus; juste un outil de travail permettant d'accéder au temps libre et, éventuellement, à la liberté de partir," déclare Gildas Simonneau. "Nous fonctionnons selon un mode "salarié" à l'opposé du "Gaec institutionnalisé en Mariage" tel que celui-ci est généralement perçu, ajoute Dominique Chaillou" L'idée de fond tient à la transmission à la génération suivante, avec la volonté de ne pas alourdir cette transmission. Pour l'entrant, le compte associé n'excède pas 30000€ qui sont capitalisables à titre privé, en l'espace de 3 à 4 ans au regard des 40000€ de revenu annuel dégagé par l'associé.


L'accord moral

La priorité de chaque instant vise à faire vivre l'aspect partagé de la ferme: une réunion du Gaec a lieu chaque lundi, "Dans la réflexion et la convivialité, pour préserver l'humain et la relation," relate Philippe Tanguy. Le compte rendu hebdomadaire est consigné dans un cahier paraphé par chacun. "L'organisation de notre travail ressemble à une "convention collective" qui a valeur d'accord moral. Notre choix de société déterminé à partir d'une vision globale en fait une ferme "expérimentale" aux valeurs fortes." Ces trois-là ne sont pas solitaires pour autant, leur CUMA fait figure de passerelle avec "les autres", la seule néanmoins.

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Les paddocks de 2ha occupent 75 vaches 3 jours au printemps (soit 1 are par jour et par vache). Elles entrent dans une herbe à 18-20 cm, en sortent lorsque la terre est visible (soit 4 cm).


Un métier à part

"Chacun sait que les systèmes herbagers pâturants attirent des profils atypiques," enchérit Gildas, ce à quoi il convient d'ajouter que les 3 associés ont conscience que cette ferme ne peut attirer que des gens qui ont déjà un parcours personnel. À ce titre, ils s'inquiètent du recrutement des nouvelles générations davantage intéressées par la technologie et le matériel. "On ne fait pas le même métier que les autres," est persuadé Gildas, à la fois le plus jeune du trio et néanmoins le plus vieil associé du Gaec.


1,3 paillettes par gestation

La physionomie du troupeau a été modifiée depuis 2012, dans l'objectif d'un moindre gabarit, de davantage de fertilité et de matière utile: il subsiste 20% de Ho côtoyant 80% de croisées. La fertilité des Ho motive également le croisement Jersey. Désormais, les résultats affichent 67% de réussite en IAP et 90% du reste prennent en 2e IA.

Le choix des 12 à 16 génisses nécessaires est définitif au 18 février. Elles sont choisies dans l'objectif des vêlages de printemps à l'âge de 24 mois. Leur développement est sécurisé par des vaches nourrices choisies dans le dessein d'une retraite active et d'après leur comptage cellule un peu plus élevé. La bitraite a stabilisé la production à 5000L/v/an (70vl pour 350 000L), avec des taux passés de 38-31 à 43-33 et valorisés 430€/t par Biolait.

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Des chemins bétonnés assurent l'accès au paddock et la facilité de déplacement des vaches


Sécuriser l'accès au pâturage

Les 95ha utilisés depuis 15 ans sont pour 20% du foncier fruit d'échanges avec des voisins classiques… intensifs. Par conséquent, le Gaec a gagné en respectabilité, mais la génération précédente – profondément militante – a fait le passage, admettent-ils. La stratégie des associés est simple: l'accès à la propriété n'a d'objectif que la sécurisation de l'accès au pâturage. Face à une génération de cédants, les tarifs vont pourtant croissant (2500€/ha), car la région est attractive, industrialisée et favorable aux céréales;

Viser l'économie de charges

Le système pâturant évolue depuis 1990. Il ne subsiste désormais que 4ha de maïs. Les échanges de parcelles ont été décisifs pour y parvenir. Les prairies sont composées de dactyle+fétuque+TB+lotier pour faire face à la météo sèche. Dans ce contexte, le dactyle est moins lactogène, mais ses racines traçantes lui permettent d'être plus réactif dès le retour de la pluie. En conséquence, il étale davantage la production. Ils sont vigilants à propos de l'évolution des prairies qui ne sont renouvelées que par tranches de 2 à 4 ha. Une moindre production est acceptée dans l'objectif d'une économie de charges.

Là encore, la philosophie est le moteur de l'action: "100ha produisent 500t de MS. Que fait-on de cette ressource ?" une interrogation à contre-courant du mode de pensée conventionnelle.


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Les éleveurs pratiquent eux-mêmes les inséminations artificielles. Les campagnes d'IA démarrent au 1er Mai et 1er Novembre


GAEC MALABRIT

Main d'Oeuvre 

3 UTH 

Précipitations

700 mm

Surface Totale 

96 ha 

Surface pâturée 

96 ha

Type de pâturage VL 

Tournant

T MS / Ha / An

5 Tonnes

Tonnage entrée

18 cm / 1 T MS 

Tonnage sortie


Vaches traites 

70

Races

Jersey, Friesian & R Norv

Période vêlage 

80% Fév / 20% Sept 

Durée des vêlages 

3 mois

Détection chaleurs 

Visuel

Date début IA 

1 Mai / 1 Nov

Date entrée taureaux 

Pas de taureau 

Taux gest. 6 semaines

90%

Cycle de traite 

2 par jour 

Date fermeture SdT


Lait / Vache 

5000

TB / TP 

43 / 33

EBE / 1000L 

391€

EBE/ Ha SFP Lait 

1427€

Revenu / UTH 

40 000€



Vacances 

10 semaines /an 

Week-End 

1 sur 3


GAEC MALABRIT

80% des 75 vêlages du Gaec Malabrit se déroulent en février-mars, en présence d'au moins 2 associés…  puisque tout le monde prend des vacances scolaires à tour de rôle sur 3 ans. Le restant survient à l'automne, for à propos car, paradoxalement, le trio (de g. à d.) constitué de Gildas Simonneau, Dominique Chaillou et Philippe Tanguy connaît son talon d'Achille : "Arrêter de traire l'hiver pourrait inciter à décrocher la motivation pour la ferme".